*Tribune libre sur l’institution du Sénat au Bénin*
*Une réforme de sagesse pour solidifier durablement la République.*
(Par Emmanuel Zossou, ancien maire de Porto-Novo)
La promulgation de la loi N° 2025-20 du 17 décembre 2025 portant révision de la Constitution du 11 décembre 1990 marque un tournant institutionnel majeur pour le Bénin. L’instauration du Sénat et l’introduction du septennat témoignent de la volonté du président Patrice Talon de conduire le pays vers une démocratie mature, axée sur la stabilité, la continuité et la sagesse institutionnelle. Cette réforme ne doit ni être réduite à des calculs politiques immédiats ni être caricaturée. Elle doit être analysée à la lumière de l’expérience accumulée par le Bénin au cours des trente-cinq dernières années de démocratie, ainsi qu’en tenant compte des défis contemporains auxquels notre République fait face.
*Une réforme née d’un débat politique réfléchi et partagé.*
Il est crucial de rappeler que cette révision constitutionnelle émane d’une initiative parlementaire, portée par les députés Assan Séibou et Aké Natondé, présidents des groupes parlementaires Bloc Républicain et Union Progressiste Le Renouveau. Cependant, comme l’a expliqué le président Patrice Talon, cette réforme ne s’est pas construite en vase clos. Le chef de l’État a activement participé à la maturation de cette proposition, en nourrissant le débat, en assumant sa vision et en garantissant que cette réforme s’inscrive dans l’intérêt supérieur de la Nation. L’adoption du texte par l’Assemblée nationale le 14 novembre 2025, sa déclaration de conformité par la Cour constitutionnelle, puis sa promulgation le 17 décembre, illustrent un processus républicain rigoureux, respectueux des institutions et des principes démocratiques.
*Pourquoi le Sénat est devenu une nécessité?*
L’expérience du monocamérisme, bien qu’ayant permis de réaliser des avancées, a également révélé certaines limites. Depuis 1990, l’Assemblée nationale a joué un rôle fondamental dans la consolidation de notre démocratie. Toutefois, l’absence d’une seconde chambre a souvent privé notre système politique d’un espace de réflexion, de médiation et de régulation. Le Sénat vient combler ce vide institutionnel. Il ne s’agit pas d’une institution de trop, mais d’une institution supplémentaire, essentielle à la stabilité, à la qualité de la législation et à la paix politique.
*Le Sénat, un arbre à palabres républicain et apolitique*
Le président Patrice Talon, lors de sa rencontre avec la presse, a souligné que le Sénat ne doit pas être perçu comme une chambre de confrontation, mais plutôt comme un « arbre à palabres républicain », inspiré de nos traditions africaines où les sages du village se réunissent pour écouter, arbitrer, concilier et préserver l’harmonie sociale. Cette vision est profondément juste. Le Sénat doit être une chambre de conciliation, un véritable conseil des sages, réunissant des personnalités ayant accumulé des expériences de vie, de gouvernance et d’arbitrage dans des domaines variés. Il s’agit d’un compendium d’experts, dont la République a besoin pour orienter la vie publique et prévenir les crises inutiles. De plus, la composition du Sénat, qui se veut apolitique, en fait le meilleur garant de la démocratie. Contrairement à l’Assemblée nationale, qui est un véritable champ de bataille politique où les partis se confrontent, le Sénat sera moins soumis aux logiques partisanes immédiates. Sa nature apolitique lui permettra de jouer un rôle modérateur, en préservant l’équilibre institutionnel et en agissant comme un contrepoids nécessaire pour éviter les dérives politiques. Cette caractéristique renforce son rôle de garant de la stabilité et de la démocratie, permettant d’offrir à notre système politique un espace de réflexion et de régulation indépendant des passions partisanes.
*Une institution pensée pour la stabilité, dans un contexte sous-régional troublé*
La pertinence de cette réforme se révèle d’autant plus clairement lorsque l’on observe la situation politique instable dans notre sous-région. Les pressions visant à remettre en question les fondements républicains et à bouleverser les principes de gouvernance sont de plus en plus fréquentes. Certains pays, en tentant un retour à des pratiques obsolètes, se retrouvent aujourd’hui à rattraper des décennies de retard. Face à cette réalité, il serait irresponsable de céder à de telles tentations. Le Bénin a su trouver un cap, redorer sa crédibilité et s’imposer comme un modèle de démocratie en Afrique. C’est précisément au moment où les acquis commencent à porter leurs fruits qu’il devient nécessaire de protéger l’ordre républicain. Le Sénat s’inscrit dans cette logique de stabilité. Il constitue une digue institutionnelle, un outil de régulation et un rempart contre les dérives et l’aventure politique.
*Un choix d’avenir, au-delà des hommes*
Nous sommes convaincus que, dans quelques années, les Béninois comprendront la justesse de cette réforme. Le président Patrice Talon, en promulgant cette loi, n’a pas agi pour des considérations personnelles, mais dans l’intérêt de la Nation. Sa volonté est clair : maintenir le pays sur la voie du développement durable et éviter la tentation du « après moi, le déluge ». Cette réforme ne concerne pas un homme, mais bien la République. Elle traduit une responsabilité historique, la volonté de préparer l’avenir et de léguer aux générations futures des institutions solides et adaptées aux défis du XXIe siècle. En ce sens, la création du Sénat représente une étape décisive dans le processus démocratique béninois. Elle mérite d’être défendue, expliquée et appropriée par tous.
Source : https://adjashenews.bj/
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